Cette année, la Patrouille de France souffle ses 70 bougies. Véritable institution de l’aviation française depuis 1953, la PAF émerveille les passionnés d’aviation lors de ses meetings estivaux et autres manifestations officielles. Surnommée « la Grande Dame », l’escadrille tricolore est devenue un symbole français dans le monde, tout comme la tour Eiffel, et elle a su traverser les décennies en suscitant des vocations chez les futurs pilotes de l’armée de l’air. Arrêtons-nous un instant sur l’histoire de la PAF et sur cette institution supervisée par ces pilotes d’élites à la combinaison bleu ciel.
L’histoire de la Patrouille de France
La première démonstration aérienne française en patrouille remonte à 1931, sur la base 251 d’Etampes-Mondésir. Ce premier meeting est réalisé par les moniteurs de l’école de perfectionnement au pilotage, à bord de trois avions Maurane-Saulnier MS230. C’est ainsi qu’entre 1932 et 1939, la patrouille d’Étampes est choisie pour représenter la France lors des meetings internationaux. Elle rejoint en 1937 la base aérienne 701 de Salon-de-Provence, sous l’appellation « la patrouille de l’école de l’air ». Durant la seconde guerre mondiale, les meetings aériens sont interrompus et il faut attendre 1947 pour que le ministère de l’air daigne instaurer une nouvelle escadrille de présentation de l’armée de l’air, baptisée EPAA. D’abord installée à Tours, elle regagnera rapidement sa base originelle d’Étampes. Les spectaculaires meetings aériens attirant de plus en plus de monde, diverses formations sont alors proposées au sein de l’armée de l’air, afin de recruter futurs pilotes et mécaniciens. La Patrouille de France doit officiellement son nom à Jacques Noetinger, un journaliste-commentateur, qui lors d’un meeting aérien en 1953, baptise cette dernière « Patrouille de France », appellation entérinée quelques mois plus tard par les officiels de l’armée de l’air française.
Evolution depuis 1953
Entre 1953 et 1963, la Patrouille de France va changer de base à plusieurs reprises. En 1954, elle quitte la base 112 de Reims pour la base 102 de Dijon. L’année suivante, elle s’installe à Cambrai, sur la base aérienne 103. 1956 marque l’année des premières représentations des meetings à l’étranger. Ainsi, la Patrouille de France est divisée en deux escadrilles : une patrouille composée de Mystère IV destinée aux représentations à l’étranger, une autre composée de MD 450 Ouragan et basée à Bremgarten, en Allemagne, pour assurer les meetings sur le sol français. Enfin, entre 1957 et 1961, les avions sont stationnés à Dijon et à Nancy. En 1959, la Patrouille de France accompagne le Général de Gaulle lors de sa tournée dans les territoires de l’ex-Afrique occidentale française. En janvier 1964, pour des raisons budgétaires, l’escadrille est dissoute. Mais soucieux de voir disparaître le nom de « Patrouille de France », le ministère des armée décide de conserver « la Patrouille de l’école de l’air de Salon-de-Provence ». Cette dernière, qui évolue au sein de l’école de l’air depuis 1937, en parallèle de la Patrouille de France, lui permet d’être pérennisée. Pierre Mesmer, alors ministre des armées, officialise l’événement en février 1964. Les 6 Fouga Majister basés à Salon-de Provence vont alors devenir le flambeau de la voltige de l’armée française durant 16 années.
Les pilotes et leur placement
La Patrouille de France est composée de 9 pilotes d’élite (8+1 remplaçant) et chaque année, 3 nouveaux pilotes intègrent la prestigieuse sélection. Ce sont tous des pilotes de chasse issus de l’armée de l’air et de l’espace, possédant minimum 1 500 heures de vol sur avion à réaction (Rafale, Mirage 2000, Alpha Jet…), ainsi que la qualification de « chef de patrouille ». Les profils issus de l’école de l’air peuvent se présenter comme « charognard »: ils seront placés derrière le leader de la formation. Les élèves officiers du personnel naviguant (EOPN) peuvent, quant à eux, postuler en qualité d’équipier au sein de la mythique escadrille. A noter que les 3 nouvelles recrues annuelles sont sélectionnées par les pilotes en place.
- Le leader : il porte le nom d’Athos 1 et reste à son poste pour une durée d’un an. Véritable chef d’orchestre de la formation, il définit avec son équipe les figures aériennes et les formations que la patrouille effectuera durant la saison. Pour les 70 ans de la Patrouille de France, le commandant Aurélien Declercq, pilote de Rafale, officie en qualité de leader.
- Les intérieurs : Athos 2 et Athos 3 forment l’intérieur de l’escadrille et évoluent au plus près du leader.
- Le charognard : Athos 4 est placé derrière le leader et en avale toutes ses fumées ! C’est le digne successeur, l’année suivante, du leader.
- Les solos : composés d’Athos 5, leader solo et d’Athos 6, second solo. Leur mission est d’effectuer les croisements et les percussions, lors de la synchronisation.
- Les extérieurs : composés d’Athos 7 et d’Athos 8, ce sont les équipiers les plus éloignés du leader et leur poste demande une très grande concentration. Ils doivent aussi faire preuve d’anticipation pour maintenir les formations.
- Le remplaçant : Athos 9 est le pilote le plus ancien de la Patrouille de France, capable de remplacer n’importe quel équipier, à l’exception du leader. Le remplaçant a aussi occupé les postes d’intérieur, de second solo et de leader solo au sein de l’escadrille.
Un avion, un pilote, un mécanicien
La Patrouille de France dispose d’une équipe d’une trentaine de mécaniciens supervisée par le directeur technique. Tous volontaires, ils travaillent souvent tard et dans la nuit pour assurer les représentations et meeting du lendemain. Ils sont répartis en deux équipes :
- L’équipe dépannage : outre les missions d’entretien courant, l’équipe dépannage est chargée d’intervenir sur toutes les interventions nécessitant l’immobilisation de l’avion. Son rôle est aussi de préparer les Alpha Jet pour les meetings de la saison. Elle est basée à Salon-de-Provence.
- L’équipe piste : le mécanicien de piste choisi son pilote, c’est une tradition et il l’accompagne durant la saison estivale sur toutes les manifestations aériennes. Sa mission est d’assurer la mise en œuvre de l’Alpha Jet à chaque départ et chaque retour de vol. Surnommé « pistard », il effectue généralement une à deux saisons avant de rejoindre l’équipe dépannage basée à Salon-de-Provence. Lors de la phase de convoyage avant chaque meeting, le mécanicien de piste vole avec son pilote, en place arrière de l’avion. A l’instar de son pilote, son nom est aussi inscrit sur l’aéronef.
Les avions utilisés pour la Patrouille de France
Depuis sa création, 5 modèles d’avions ont été utilisés pour les représentations officielles et les meetings aériens, contribuant au rayonnement de l’armée de l’air française dans le monde.
- Le Republic F-84 G Thunderjet (1953-1954) : cet avion américain est un chasseur bombardier à réaction datant de la fin des années 40. Fourni à la France en 1943, il volera brièvement entre 1953 et 1954 pour la Patrouille de France.
- Le Dassault Ouragan (1954-1957) : construit par Dassault, cet avion « Made in France » est le premier avion à réaction français construit en série. Il sera utilisé entre 1954 et 1957 par la Patrouille de France, avant d’être remplacé par son successeur, le Mystère IV.
- Le Dassault Mystère IV (1957-1964) : cet avion de chasse a été réceptionné en 1955 par la douzième escadre de Cambrai. Sur cette base, une première patrouille acrobatique voit le jour dotée du nouvel avion. En 1955, douze Mystère IV défileront dans le ciel de Paris lors du traditionnel défilé du 14 juillet. Il devient avion officiel de la Patrouille de France entre 1957 et 1964.
- Le Fouga Magister (1964-1980) : Cet avion français est un biplace subsonique initialement destiné à l’entrainement des pilotes. Il est reconnaissable à son empennage en forme de V. Adopté comme avion de voltige par plusieurs patrouilles acrobatiques, sa dernière représentation s’est déroulée en septembre 1980, à Salon-de-Provence.
- L’Alpha Jet (depuis 1981) : la Patrouille de France utilise ce modèle depuis plus de 40 ans. C’est un avion d’entrainement et d’attaque au sol, de conception franco-allemande. Facilement identifiable avec sa robe bleu blanc rouge, ce biplace performant décolle en 700 mètres, il possède un phare intégré dans le nez et son conteneur fumigène est fixé sous son ventre.
Les différentes figures acrobatiques
La Patrouille de France effectue des acrobaties aériennes et renouvelle son programme chaque année. Les entraînements se déroulent en hiver et les meetings et représentations entre avril et octobre. Chaque programme appelé « série » est déterminé par le leader, en concertation avec son équipe. La série de l’année se divise en deux partie :
- Le ruban : dans cette figure, les 8 avions évoluent en formation serrée et effectuent des changements.
- La synchro : la patrouille se divise en 2 formations effectuant alternativement des figures acrobatiques à 2, 4 ou 6 avions.
La figure emblématique de la Patrouille de France reste « le cœur coupé d’une flèche », réalisé par les deux solos. La formation « diamant » est la formation de base mais de nombreuses autres sont susceptibles d’être utilisées pour la série parmi lesquelles on retiendra :
- Alpha : les 8 appareils forment la lettre Alpha dans le ciel.
- Flèche : les avions forment une pyramide.
- Concorde : l’escadrille forment le mythique avion Concorde.
- Diamant : les appareils se rapprochent pour former un diamant.
A noter que les Alpha Jet évoluent à des vitesses comprises entre 300 et 800 km par heure, espacés de 2 à 3 mètres seulement.
Considérée comme l’une des meilleures patrouille du monde, la PAF représente ainsi la France à l’étranger ou elle effectue régulièrement des acrobaties aériennes lors de représentations officielles. Chacune de ses démonstrations est un balai aérien affichant une maîtrise remarquable de l’espace.
Si vous souhaitez voir voler la Patrouille de France, le calendrier des meetings est disponible sur le site du ministère des armées